Lundi 10 février, des associations d’handicapés ont manifesté devant le siège de Tisséo pour protester contre la gestion du service Mobibus. Des critiques qui font écho avec un ras-le-bol général autour de l’accessibilité des transports publics toulousains.

Les lignes de bus Tisséo sont particulièrement visées par les associations « Je n’irai pas voter aux élections municipales car je ne peux pas accéder à mon bureau de vote ». Le constat fait par Patrick Giorgi, 55 ans, est effarant. Paraplégique et habitant du quartier Saint-Michel, il dénonce vivement les problèmes d’accessibilité aux services publics dans la ville de Toulouse. Le dernier baromètre de l’accessibilité réalisé par l’Association des Paralysés de France (APF) fait état d’une ville en légère progression (15,5/20 contre 15/20 en 2012), mais toujours en retard vis-à-vis de métropoles comme Grenoble, Nantes et Lyon.

Malgré une note de 21/21 pour la « politique locale volontariste » menée par la mairie, les associations d’handicapés pointent des retards accumulés par les municipalités successives depuis 1975, date de la première loi sur l’accessibilité. Pour Odile Maurin, déléguée départementale de l’APF, les moyens alloués sont insuffisants, et la question des transports à Toulouse devient le centre névralgique des protestations.

Mobibus dans la tourmente

Le 10 février dernier, c’est un cortège peu ordinaire qui manifestait devant le siège de Tisseo, le réseau de transport en commun de l’agglomération toulousaine. Sous l’égide de plusieurs associations, valides et handicapés se sont mobilisés ensemble pour dénoncer les dysfonctionnements de Mobibus, le service de transport à la demande pour les personnes à mobilité réduite. Sur des pancartes accrochées aux fauteuils roulants, on pouvait lire des slogans tels que “liberté, égalité dans les transports spécialisés”, “Tous égaux, pas chez Tisséo” ou encore “Les usagers de Mobibus ne sont pas des colis à déposer”.

Outre le réseau traditionnel de bus et de métro, dont des lignes sont déclarées accessibles alors que certains arrêts ne le sont pas, Mobibus ressemble de plus en plus à un calvaire pour les usagers. Gérard André, président du conseil d’aministration de Tisseo n’a pas donné suite à la demande d’entretien d’Univers-Cités et fait la sourde oreille face aux critiques des associations. Il considère que les dysfonctionnements pointés sont mineurs, et refuse toute discussion bilatérale avec les représentants d’usagers du service Mobibus.

« On est traités comme des petits papiers, des marchandises qu’on prend quand on veut et qu’on dépose quand on veut », ajoute Odile Maurin. La déléguée de l’APF reçoit tous les jours des témoignages d’usagers Mobibus, qui se retrouvent à faire le tour de Toulouse branchés sur respirateur, ou à attendre un transport qui arrive finalement en retard ou est déjà passé. Un règlement intérieur transmis récemment à l’ensemble des usagers a été la goutte qui a fait déborder le vase du côté des associations. Selon Odile Maurin, ce règlement, qu’il semble obligatoire de signer pour pouvoir disposer du service, « fixe des obligations pour les usagers mais pas pour les exploitants ».

Toutes ces critiques font écho au ras-le-bol général autour de l’accessibilité des transports publics toulousains. Un Grenelle du transport adapté a été demandé par l’APF ces dernières semaines. La proposition reste pour l’instant lettre morte.

Des usagers mitigés

Les plaintes reposent sur des problèmes mettant en cause la sécurité, le non-respect du service de “porte à porte”, les réservations problématiques, des groupages et retards abusifs, et des oublis de personnes. Pourtant, alors que les associations dénoncent également des phénomènes de maltraitance et de discrimination, une étude de satisfaction réalisée par un prestataire extérieur auprès de 30% des 4 300 usagers que compte Mobibus relève 85% d’avis favorables ou très favorables.
Pour tenter de comprendre les raisons de cette contradiction, nous nous sommes entretenus avec deux usagers du service Mobibus.

Nicole (63ans) a des difficultés pour marcher et Marie-Monique (67ans) est en fauteuil roulant depuis plus de dix ans. Elles utilisent le service Mobibus deux à trois fois par semaine pour faire des courses, se promener ou aller dans des réunions.
Pour Nicole, « le service fonctionne très bien. Les minibus sont bien aménagés, il y a une rampe qui glisse, et dans l’état dans lequel [elle est], la situation est telle qu’elle est”. Fataliste, “[elle] accepte la situation telle qu’elle est, sans rien dire” et s’accommode des retards et de la contrainte logistique qui l’oblige à prévoir tous ses déplacements plus d’une semaine à l’avance. Selon elle, “il faut juste s’organiser”.

Marie-Monique est quant à elle plus critique. Elle souligne des retards répétés et insiste sur la problématique de devoir commander un transport 8 jours à l’avance car “quand on prend le minibus, c’est qu’on en a besoin, et on a parfois des nécessités de dernière minute”. Malgré tout, Monique est plutôt satisfaite du réseau de transport en commun de Toulouse : “Les chauffeurs de Mobibus sont très gentils et le métro est nickel au niveau des ascenseurs”.

Des efforts à prévoir

Il est finalement difficile de faire un état des lieux du service Tisséo-Mobibus. Si les usagers semblent s’accorder autour des problèmes de logistique et de retards, ils ont tous une expérience de Mobibus, une manière d’appréhender le handicap et un point de vue qui leur est propre. Une chose est sûre, après avoir dégringolé de la 16ème à la 28ème place au baromètre national de l’accessibilité des personnes handicapées, Toulouse doit continuer encore de fournir de gros efforts.