Créées en 1973 à Toulouse, les Universités du temps libre rencontrent un succès croissant auprès des retraités désireux d’étendre leur culture générale. Mais certains optent pour une autre solution, bien plus originale : (re)devenir étudiant. « Univers-Cités » a rencontré trois de ces élèves pas tout à fait comme les autres.

Au Mirail, les formations littéraires attirent beaucoup de retraités.

« En vérité, je n’ai jamais cessé d’étudier ». De la part d’un jeune docteur en psychologie, la remarque prête à sourire. Mais, avant de rédiger une thèse sur « Le traitement de situations inattendues d’extrême urgence en vol », Jean Pinet a notamment conçu les formations pour Airbus… dont celle du Concorde. A 84 ans, cet ancien pilote de chasse et d’essai a rejoint l’université du Mirail il y a quatre ans, pour « mettre en musique » une réflexion née pendant sa carrière : « Le comportement des pilotes responsables d’accidents m’a toujours causé souci, se rappelle l’ex-étudiant des Arts et métiers et de Supaero. A l’époque, on dénonçait leur manque de discipline, mais c’était une erreur. J’ai donc entrepris de trouver les vraies raisons. Et puis une fois à la retraite, j’ai décidé de partager mes résultats sous forme de thèse. »

« Garder l’esprit en éveil »

Une soif de connaissance et d’échanges que partagent tous ces étudiants à la retraite. A 63 ans, Jean Berger a suivi, pendant deux ans, des cours à Sciences Po Toulouse en tant qu’auditeur libre, avant d’en devenir l’un des enseignants : « L’idée de reprendre des études me trottait dans la tête depuis longtemps, analyse cet ancien membre de la direction centrale des ressources humaines d’Airbus. Même si mon travail était intéressant, je sentais que, d’une certaine manière, j’étais en train de m’abêtir. Retourner à la fac m’a permis de m’imposer les disciplines intellectuelles et de vie dont j’avais besoin. »
Lectures, recherches sur Internet, préparation d’exposés, voire même partiels pour tester son niveau, Jean Berger a choisi de vivre cette formation comme n’importe quel étudiant… ou presque : « Sciences Po, c’est l’école que je rêvais de faire étant jeune. Cependant, tous les enseignements ne m’intéressaient pas au même degré, compte tenu de mon expérience professionnelle. J’ai donc décidé de découvrir en priorité les cours de sociologie, d’histoire ou de politique. Et, avec la complicité des professeurs, certains séminaires dont la thématique m’intéressait particulièrement ! »

Rencontres intergénérationnelles

Au-delà du plaisir d’apprendre, les retraités apprécient aussi le contact avec les étudiants, pourtant pas toujours très accessibles au premier abord ! Passionné d’art, Jacques Rives, 75 ans, suit des cours de la licence d’histoire de l’art proposée par le Mirail. Séduit par une conférence donnée à l’Université du temps libre par Pascal Julien, professeur à l’UT2, il est devenu auditeur libre il y a trois ans. Le temps nécessaire pour apprendre à connaître véritablement les étudiants : « A mon arrivée, j’ai vu dans leur regard qu’ils se demandaient : « Mais qui est-ce ? », s’amuse cet ancien commercial de Sanofi et ELF Aquitaine. Les travaux en groupe permettent cependant de faire sauter rapidement les barrières. C’est ainsi que j’ai fait la connaissance de jeunes brillants et passionnés, bien loin des clichés qui circulent parfois à leur encontre ! »

Les démarches à suivre

Comme toutes les personnes désireuses de reprendre des études, les retraités peuvent prétendre à deux statuts. En tant qu’auditeur libre, ils accèdent à tous les cours magistraux dispensés dans les différentes formations, ainsi qu’aux bibliothèques universitaires présentes sur les campus. Ils sont libres de choisir leurs enseignements, peu importe l’année d’études dans laquelle s’inscrit le cycle en question.
Les plus déterminés peuvent, pour leur part, tenter d’acquérir le statut d’étudiant. Dans ce cas, la personne suit un parcours classique, et doit passer ses partiels à chaque semestre. Pour ce faire, il est toutefois nécessaire d’obtenir une validation d’acquis professionnels, délivrée par un jury après examen du dossier du candidat. C’est le choix qu’a notamment fait Louise del Busto Gomez : à 84 ans, elle est devenue avocate, après avoir effectué des études de droit à Toulouse et Barcelone.