Depuis l’élection de François Hollande, la question de la dépénalisation du cannabis fait souvent irruption sur la scène médiatique. Plusieurs ministres, suivis d’élus issus de divers partis, se sont timidement exprimés sur le sujet. Et pour éviter le silence, l’association toulousaine Chanvre et Violettes se mobilise.

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Le 15 octobre 2012, Vincent Peillon, ministre de l’Éducation, s’était prononcé en faveur de l’ouverture d’un débat sur le cannabis. «On peut lutter par les moyens de la répression, je suis absolument pour, mais je vois aussi que les résultats ne sont pas très efficaces», avait-il alors déclaré sur les ondes de France Inter. La phrase avait fait polémique, tout comme les propos de Cécile Duflot qui en juin dernier s’était exprimée en faveur de la dépénalisation, au nom de son parti, Europe Écologie Les Verts. Cette mesure permettrait, toujours selon la ministre, de faire baisser le trafic et de mener une politique de santé publique responsable. Si ces apparitions médiatiques ont été grandement remarquées, elles n’ont pas ou peu été porteuses de discussions plus profondes à ce sujet.

«La violette de Toulouse et le chanvre de partout»

Dimanche matin, au marché Saint-Aubin. Parmi les stands improvisés où se pressent les passants, l’un retient l’attention. Quelques militants, une petite table de documentation sur le chanvre, un contact facile… C’est la toute nouvelle association toulousaine Chanvre & Violettes qui vient sensibiliser le grand public au sujet du cannabis. «Notre association a un double-objectif : le premier est d’informer la population, et le deuxième est plus politique, nous voulons un réel débat», explique un militant. L’association organise chaque année des manifestations, tels que l' »appel du 18 joint », au mois de juin, et la marche mondiale du cannabis, en mai.

Pour beaucoup de militants de Chanvre & Violettes, les prises de position des politiques ne font pas vraiment avancer le débat : «C’est vrai qu’on en parle plus qu’avant, mais le débat est toujours avorté. Les médias ne se tournent jamais vers les associatifs qui, eux, connaissent bien la question. Le débat est en réalité interdit, puisque la loi interdit d’en parler», explique une membre de l’association. «Aucune parole n’est accordée aux consommateurs de cannabis», s’indigne un autre militant, «invitez les cannabiculteurs, invitez les chanvriers, invitez les dealers de cités, celles et ceux qui connaissent et peuvent en parler !». Aujourd’hui, et selon l’article L.3421-4 du code de santé publique, la provocation à l’usage et au trafic de cannabis est passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000€ d’amende, même si celle-ci est sans effet.

Un contexte très répressif

A la question des motifs de leur action, les militants de Chanvre & Violettes répondent très simplement : « Pour éviter que les gens souffrent. » 5 000 personnes sont actuellement incarcérées en France pour avoir eu en leur possession du cannabis dans des quantités variables. Ce sont également 120 000 interpellations pour l’année 2009, suivies ou non de procédures pénales. Ainsi, l’association dénonce cette « politique du chiffre », mais pas seulement. « La justice dans cette matière est tellement aléatoire », raconte une militante, « ça dépend du juge, ça dépend de la juridiction, ça dépend du policier… ».

Le congrès du PS de Toulouse a permis un recadrage des troupes. Pas d’électrons libres du gouvernement, pas de déclarations fumantes : l’image parfaite d’un parti uni derrière son nouveau premier secrétaire Harlem Désir. Pourtant, Daniel Vaillant, ancien ministre et auteur d’un rapport parlementaire favorable à la dépénalisation, avait remis au congrès une contribution allant dans ce sens. « Le laxisme, c’est de ne rien changer  », dit-il dans ce texte, dont l’un des signataires est Gérard Bapt, député de la deuxième circonscription de la Haute-Garonne. Mais toujours rien à ce sujet dans l’agenda du gouvernement Ayrault : « Le débat est loin d’être ouvert », ironise un militant, « Manuel Valls a déclaré la guerre à toutes les drogues ». Une affaire à suivre.