Certains n’en avaient jamais entendu parler, d’autres connaissaient quelques-uns de ses dialectes. Mais une chose est sûre : l’Occitanie, à la réputation parfois «ringarde », ne laisse pas indifférents les étudiants étrangers. Ils trouvent même que la culture occitane enrichit le pays.

Le patron du bistrot occitan l’Estanquet, Remèsi Firmin, insiste : le lieu est « ouvert à toute nationalité ». Néanmoins, dans la pratique, ce sont essentiellement des Espagnols et des Italiens qui foulent l’entrée de son bistrot. Nous avons eu envie de savoir comment est perçue l’Occitanie par des étudiants étrangers, originaires de pays aussi divers que la Chine, l’Italie, le Liban et la Russie.

Beaucoup ont véritablement découvert la langue occitane et sa culture à leur arrivée à Toulouse. Cyrille Warde, étudiant libano-italien à l’IEP de Toulouse, connaissait davantage la Catalogne et le Pays Basque. « Au Liban, on a une vision de la France centralisante. L’occitan, on ne connaît pas du tout ». Il a été surpris par cette histoire et cette langue propres à la région.

C’est avec la même surprise que Chen Wang, étudiante chinoise à l’IEP, a découvert l’occitan. « La première fois que j’en ai entendu parler, c’était dans le métro, raconte-t-elle. L’accent est très remarquable, au début ça me faisait rire ».

Quant à Tatiana Migulko, étudiante à l’IEP venant de Russie, elle a étudié le vieux provençal pendant ses études littéraires dans son pays. « J’avais entendu parler de l’Occitanie et de la région. Je savais que c’était dans le Midi mais je ne savais pas si la langue existait toujours ».

Claudio Montebello, étudiant italien à Supaero, connaissait l’occitan mais ne savait pas que cette langue était parlé à Toulouse : « Je pensais que c’était juste là où j’habitais, dans le Piémont, à Nice… ». Il n’a pas été surpris pour autant : « En Italie toutes les régions ont des patois différents, donc je trouve ça normal, cette tradition qui est plus liée au territoire qu’à la nation ».

« C’est une manière de penser »

Pour eux, l’Occitanie est avant tout une culture, avec une langue, une histoire, une communauté. Selon Claudio, « c’est une culture, un peuple, pas seulement une langue ». Pour Tatiana, c’est avant tout « un état d’esprit » : « J’étais étonnée par les croix occitanes présentes partout, même dans les cimetières, juste à côté des croix catholiques ». Elle perçoit ce peuple comme une véritable communauté : « Quand tu leur demandes ‘tu es d’ici ?’, ils répondent ‘je ne suis pas Toulousain, je suis Occitan' ». « C’est des gens sympa déjà, des gens du Sud, lance Cyrille. C’est quelque chose qui est mystérieux pour moi, quelque chose que j’ai envie de découvrir, dont on ne parle pas beaucoup ».

Mais ils ne sont jamais rentrés dans un restaurant occitan et n’ont pas participé à des manifestations culturelles occitanes. Cyrille et Tatiana ont quand même vu les festivités occitanes place du Capitole il y a quelques jours. « J’ai acheté la confiture de la région avec la petite croix occitane », raconte Tatiana. Claudio raconte qu’« au Piémont, près de la frontière avec la France, il y a des fêtes populaires qui sont organisées, un peu comme ici, mais je n’ai jamais participé ». Il a cependant visité la Maison de l’Occitanie, dans le cadre de ses études.

« Ça enrichit le paysage culturel français »

Quant aux revendications de la culture et de la langue occitane, ils les trouvent légitimes. « Je pense que c’est justifié. S’il y a assez de gens qui se revendiquent d’une culture, ils ont tous les droits et même le devoir de réclamer leur reconnaissance », affirme Cyrille. Tatiana a le même avis : « C’est bien que les régions puissent conserver leur histoire et leurs traditions. En Russie le centre est trop fort par rapport aux régions ».

Il est selon eux nécessaire de conserver la culture ancienne d’une région, aussi pour le pays : « Ça enrichit le paysage culturel français », affirme Claudio. Pour Cyrille, la culture propre à la région permet aux habitants de s’approprier leur territoire : « C’est important pour les gens d’ici : on est loin de Paris et c’est bien de se sentir ancré là où on vit ». Chen fait la comparaison avec son pays : « C’est un peu comme les caractères anciens en Chine, on ne les utilise presque plus aujourd’hui, mais les lycéens continuent de les étudier. Il est nécessaire de diffuser largement et ouvertement la langue et la culture occitane ». Tatiana conclut : « Ici, je peux dire que j’ai appris quelque chose sur les manières de conserver son histoire, d’en être fière ».